La Commanderie de Boult aux bois

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La Commanderie de Boult aux Bois est la plus importante des Ardennes.
On se rend à ce petit village en se dirigeant sur Vouziers puis on emprunte une route qui traverse une superbe forêt.

Jusqu'à 1307 :
1196 - Richard de Liron fit dont aux Templiers de la terre de Barville, proche de la Haye, sur la rivière de Bo (ruisseau connu comme étant de Barosset). Bo devenue Booul, Bou et enfin Boux qui veut dire bois. Le nom actuel de la commune est donc un pléonasme. La terre de Barville, la grande cense du Commandeur, était délimitée par les Malassises de la Croix aux bois, la Taillanderie : lieu-dit les Coulettes de Briquenay et le fossé d'Arène de Germont.
Les Templiers défrichèrent les forêts et mirent en valeur les terres. Ils y créèrent trois censes (fermes) : la Malassise, le Raduy et la Taillanderie ou la fosse au renart (le "t" n'est pas une faute).

1209 - Les Templiers de Boux partagent l'alleu de Condé avec le seigneur de Bourcq et l'abbé de saint Remy. Ils rendent justice sur leurs parts mais les pâturages et les dîmes étaient communs.
Petite église du XVème reconstruite au XVII ème qui présente un caractère fortifié avec une bretèche à l'est et quelques meurtrières.

1239 - Les Templiers achètent au comte de Grandpré 526 arpents de bois qui s'étendent de Chestres à Falaise et de la rivière l'Aisne à Longwé (forêt du Temple de Boux).

Après 1307 :
Les Commandeurs de Boux - Ordre de saint Jean de Jérusalem et Ordre de Malte - et les faits connus.

1320 - Beauduyns de Clarcy
1337 - Pierre de Brancourt
Les 3 censes (fermes) furent détruites au cours de la guerre de 100 ans - 1337/1435
1356 - Jehan d'Estorcy
1367 - Guillaume de Chauconier
1378 - Jean Cassinel
1408 - Adrien de saint Jean
1412 - Louis de Mauregard
1474 - Louis de Garancières
1495 - Georges de Huthenove
Il signe avec Robert Gaultier, le 16 mai 1519, un bail de 29 ans louant une terre, dix arpens et l'eau du ruisseau à condition que le preneur y établisse un moulin à eau pour le profit de la Commanderie.
1525 - Jehan de Sart
Boux contribua à fortifier Malte et à barrer la route aux Turcs en sacrifiant ses bois de haulte fustaye. Le paysage du village fut alors modifié car tous les secteurs déboisés ne furent pas rendus à la forêt.
Construction, vraisemblablement, de l'église en 1542 avec une des deux cloches qui portait le nom du Commandeur Jehan de Sart. Celle-ci furent enlevées par les allemands au cours de la première guerre mondiale.
1565 - Les terriers rappellent que le Commandeur est seigneur haut, moyen et bas justicier d'où le lieu dit la potence, non loin du château. Il nomme les officiers tels que bailli, lieutenant, mayeur, procureurs d'offices, greffier, sergents et fortiers.
1569 - Jean d'Ache
1574 - Charles de la Rama du Plessis Herault
1581 - Ogier d'Amour
Son homme d'affaires, Jean la Chaise, bourgeois de Reims (51) rédigea un rapport sur la population, la superficie des biens, les redevances perçues, la liste des dépendances, les dîmes et leur rapport, les autres revenus divers, les recettes et charges de la Commanderie et du Commandeur.
1621 - Adrien de Wignacourt (62ème grand Maître)
Né en 1618 (ndla : Commandeur à 3 ans ?)Il est apparenté à Alof Wignacourt, Grand Maître de l'Ordre de Malte; peint en armure en 1608 par Caravage. Ce tableau est exposé au musée de Louvre à Paris. Il résida en fait à Malte et ne revint en sa Commanderie qu'en 1660 pour redresser un pays ruiné. Il décéda en 1697.
Un chateau existait, la Commanderie, avec des dépendances : granges, étables, écuries et pigeonnier, et était entourée de murailles et de fossés. En voici une description :
De l'ancienne maison forte, il ajouta deux guarittes de brique, la toiture était d'ardoises et les gouttières de plomb. Le château comprenait trois pièces au rez de chaussée, deux chambres à l'étage et un grenier.
Au rez de chaussée :
La salle basse servait de salle à manger, de salon et de chambre. Les murs étaient garnis de tapisseriesq de Flandres de plusieurs couleurs. Le sol était couvert d'un tapis. Il y avait tables, fauteuils et chaises. Dans un coin, il y avait un châlit en chêne, un lit de droguet et un gueridon à côté. Dans la cheminée on trouvait une taque servant de poêle à la chambre voisine.
Le cabinet était réservé aux valets avec des bois de couchettes et c'est là que l'on rangeait des ustensiles comme le mortier à épices, pots, pinte, chopine, demi-setier, bassin à faire le poil etc.
La cuisine disposait d'une cheminée avec crémaillère, petit matériel et deux marmites. Une grande table de chêne trônait au milieu. Aux murs, suspendus ou sur des étagères, étaient disposés des marmites, des couvercles, des grandes marmittes dites chaudières, des grils de fer, des poêles, des broches, des tourtières, une poissonnière, une cloche à fruits et des ustensiles divers.
Le fournil avait deux fours à embouchures, tisoniers et chenets, poêlon à confitures, crémaillière, maie, table et coffre.
A l'étage :
La petite et la grande chambre étaient aménagées comme la salle basse.
Un corps de logis fut ajouté en pierre de taille et couvert d'ardoises.
Au rez de chaussée : une salle avec deux fenêtres et la chambre du Commandeur avec une fenêtre et un cabinet avec une fenêtre.
A l'étage : une chambre avec deux fenêtres et une autre avec une fenêtre.
Au-dessus, il y avait les combles et une chapelle éclairée de deux fenêtres avec un bel autel dont le devant était orné de ses armes. Les ornements et objets du culte étaient rangés dans une crédence fermée à clef qui portait un tableau de saint Jean aux armes du Commandeur.
Le vestibule était entre les deux corps et l'on accédait aux étages par des escaliers de bois et le château fut meublé par ses propres fonds.
Devant le château, la cour était entourée de murailles de pierre couvertes de tuiles rondes. On entrait par une porte cochère. Une autre petite porte permettait l'accès au jardin. Au milieu de la cour il y avait un puits de pierre de taille avec quatre poteaux soutenant un toit d'ardoises. Contre la muraille, on trouvait 4 bâtiments accolés :
- un pavillon carré couvert de paille de seigle (seis) abritant fours en bas et chambre en haut,
- deux bâtiments remplis de torchis et couverts de tuiles rondes servant d'écuries,
- un dernier pavillon couvert de tuiles plates contenait la sommelerie et une chambre au-dessus.
Dans la basse cour on trouvait les bâtiments agricoles tels que deux écuries, une étable, une grande grange contenant trois écuries et un bâtiment comprenant deux pièces dont un four et au-dessus un grenier.
- une autre étable.
1635 / 1640 - La peste créa d'énormes pertes dans la population.
1666 - Voici maintenant comment est décrite l'église après les réparations commandées par Adrien de Wignacourt : "Nous l'avons trouvée en bon état au dehors ; (...) nous avons remarqué par le tableau de l'autel que ladite église est dédiée à l'honneur de Dieu et de la Sainte-Croix. (...) Le chœur de ladite église est blanchi de neuf ainsi que la charpente de dessus où il y a deux sommiers neufs (poutres) mis par ledit Sieur Commandeur ; ledit chœur couvert de plancher ; deux fenêtres garnies de vitres neuves ; la nef et clocher charpentés et couvertures d'ardoises, aussi couverts de neuf, et est en bon état, et qu'il y a deux cloches raisonnables." Le Commandeur dépensa 497 livres 18 sols pour remettre l'église en état. Voir les photos ici.
La Malassise fut laissée en ruine et non reconstruite. De ce fait, les sieurs de Pavant de Taizy et de Riencourt de Parfondreux, avantageusement, pouvaient exploiter à leur seul profit des taillis qui, en théorie, n'existaient pas.
Le moulin fut remplacé : en bas une meule gisante et une tournante et une étable. Un plan incliné permettait d'accéder à l'étage comprenant un sol en terre battue et un plafond de planches. Il y avait une cheinée et des fenêtres.

1690 - Antoine le Tonnelier de Breteuil
1696 - Louis Roger de Blecourt de Tincourt
1715 - Eustache de Vauquelin Deschesnes
1752 - Joseph de Lancry de Pronleroy
1767 - Charles Casimir de Rogres de Champignelles
1779 - Louis de Mascrany
Il fit raser une partie de l'enceinte et des communs de la Commanderie. Un nouveau château y fut construit et fini en 1788.

La maison des Hospitaliers de saint Jean était bien au lieu-dit la Commanderie à Boult aux bois mais rien ne confirme que les Templiers les avaient précédés en cet endroit.
1793 - Le château et la Commanderie furent vendus. Le château disparut très vite pour remblayer les routes.
1825 - Plus de trace de celui-ci au cadastre. Quant à l'ancien château, il n'avait plus que l'appellation de ferme de la Commanderie.

Actuellement :
- Le lieu-dit la Commanderie existe toujours,
- Le chemin templier de la Malassise dit aussi chemin de Malmaison, dans la forêt de Boult aux bois qui menait à la ferme (cense) du même nom et qui disparut vers 1450 et rendue à la forêt permet de belles balades.
- La blanche borne dans les bois de Boult aux bois, gros bloc de grès placé par les Templiers dans le fossé dit "le périmètre" qui marquait les limites de leurs biens est toujours en place.
- Le gros chêne (473 ans en 2005 donc de 1532 ?) dans les bois de Boult aux bois, préservé car marquant l'emplacement de la cense médiévale du Réduit ou Radhuy détruite durant la guerre de cent ans est toujours aussi majestueux.
- L'étang de la Linette qui, en 1663 se nommait la culée bruslée (fours de verriers et culture du lin) abritent beaucoup de grenouilles.
- Le chemin de la grand'vallée qui permettait d'amener les animaux de Boult à la Croix aux bois en passant par les bois du Commandeur se perd dans la forêt.
- Une bâtisse datant de 1608, gentihommière nommée le château est encore en place. Elle est juste à côté de l'église et eut pendant des siècles une vocation agricole. Elle appartenait à Pierre de Tiencourt, écuyer, sieur de parfondreux la croix et partageait la cense de la Malassise. Elle abrite la fédération nationale des clubs connaissance et protection de la nature et la Hulotte (revue nature).
- L'église existe toujours et un arc de pierre au-dessus de la porte reste inexpliqué. La façade aurait-elle été remaniée ? La porte d'entrée était-elle plus basse avec une niche au-dessus ? On peut voir nettement quelques meurtrières de type archères ou barbacanes et un mâchicoulis sur le mur de chevet. La statue de sainte Avoye y a été tranférée en 1772 après la suppression de la chapelle de Chamiot, village qui a disparu.

Bibliographie

  1. " Traces du passé de Boult aux bois "
    Robert Cecconello; Editions Terres Ardennaises
  2. " Cartons S5032 et S5468"
    Archives nationales

Contributeur pour les Ardennes françaises (08): Jean-Luc LEMAIRE